MEMOIRE DE FIN DE FORMATION A L'ENS: CHAPITRE 2(suite)

Publié le par gwlados

2-4 Modèle constructiviste 

Selon le point de vue constructiviste, qui s’appuie sur les données de la psychologie cognitive, " on suppose que l’apprentissage résulte de constructions mentales de l’apprenant " (Resnick, in Johsua et Dupin, 1993).

Jean Piaget dit avoir emprunté le terme au mathématicien hollandais L.J. Brouwer. Son modèle constructiviste postule que la formation de la pensée et des connaissances est une construction continue de toute la vie du sujet. La pensée piagétienne a eu de nombreux prolongements dans les pratiques pédagogiques. Et les instructions officielles relatives à l'enseignement. Elle est à la base des "méthodes d'éducation actives" qui s'appuient sur l'action propre de l'enfant et sur une pédagogie de la découverte et de l'intérêt (BOULARD G. et al.2002-2003). Le processus de construction de la pensée et de la connaissance commence par la confrontation au monde : par un processus d'assimilation, le sujet va constituer ses structures organisées de comportement (les schèmes). Ses connaissances antérieures sont déterminantes dans ce processus : ce que la personne apprend dépend de ce qu'elle sait déjà. Par la suite un processus d'accommodation le sujet va confronter ses comportements à l'environnement, et les ajuster, et ainsi et complexifier les schèmes qu'il a constitués. Le processus d'équilibration, quant-à lui réunit les deux processus précédents : c'est une autorégulation, entre l'assimilation des situations nouvelles dans les structures cognitives existantes du sujet, et la transformation de ces structures pour s'adapter à des situations extérieures nouvelles. Jean Piaget, par la recherche expérimentale met en évidence 4 paliers de développement qu'il met en relation avec des capacités d'apprentissage de l'enfant.

La théorie constructiviste de Bruner (1966) repose sur l’idée que l’individu construit individuellement du sens en apprenant (plus tard il a aussi inclus l’aspect social à sa théorie, Bruner, 1986). Donc, apprendre, c’est construire du sens. La théorie constructiviste de Bruner se base sur deux principes :

1. La connaissance est activement construite par l’apprenant et non passivement reçue de l’environnement.

2. L’apprentissage est un processus d’adaptation qui s’appuie sur l’expérience qu’on a du monde et qui est en constante modification.

Ainsi, la construction des connaissances est un processus dynamique, où l’apprenant se sert de ses connaissances antérieures comme échafaudage sur lequel pourront prendre assise de nouvelles connaissances et se développeront de nouvelles représentations du monde (schémas mentaux). De plus, compte tenu des nouvelles expériences et du contact avec l’environnement, la structure de ces schémas mentaux se complexifie et se trouve en constante modification. En d’autres termes, ce qu’un individu va apprendre dépend de ce qu’il sait déjà; et plus un individu connaît, plus il peut apprendre (Anastassis Kozanitis 2005).

Rôle de l’enseignant

 L’enseignant, ne peut plus agir comme le dispensateur agréé d'un savoir objectif ou réifié. Il doit accorder la priorité à la mise en place de séquences didactiques qui favoriseront l'établissement d'un nouveau rapport au savoir chez les apprenants, et au cours desquelles les connaissances construites sont questionnées par les élèves. On passe dès lors, d’une pédagogie de la réponse à une pédagogie de la question, selon laquelle " toute leçon doit être une réponse à des questions que les élèves se posent réellement " (Dewey, cité par Laurent Dubois et Pierre-Charles Dagau 1999).

 

Rôle de l’élève

 

Pour Bruner, l’apprenant choisit et transforme l’information, il émet des hypothèses et prend des décisions selon la structure de ses schémas mentaux. Cette structure l’aide à donner du sens aux nouvelles informations et lui procure des points de repère pour l’organiser et pour aller au-delà de celles-ci. La structure des schémas mentaux sert, en quelque sorte, de cadre conceptuel qui permet d’interpréter le monde. Cette structure peut être médiatisée par le bagage expérientiel et le vécu de chacun (Anastassis Kozanitis 2005).

Evaluation

L'enseignant ne doit pas entraver ce processus en imposant des programmes d'enseignement (ceux-ci doivent s'adapter à l'élève). Il doit analyser et pratiquer l'évaluation formative, et opter pour une évaluation continue au lieu d’une évaluation administrée uniquement à la fin de l’apprentissage. Dans certains cas, on peut utiliser des tests; cependant, le contenu devrait être identifié par les étudiants et les tests devraient pouvoir accepter une grande variété de réponse. Faire porter les évaluations sur les habiletés de haut niveau intellectuel. Évaluer le processus de construction des connaissances plutôt que, les résultats (Actes du XIIe Colloque du CIPTE Tenu à la Télé-université, 1999).

 

Avantage

Le modèle piagétien porte sur le développement des structures cognitives et renvoie l'apprentissage à l'intégration de procédures et de savoirs, rendus possibles par les structures cognitives disponibles. C'est donc un processus endogène, pour lequel l'environnement social est sans influence. L'apprentissage est ainsi vu comme un processus cumulatif et linéaire, de type instructif. On est dans la vision d'un apprentissage pré-finalisé, prévisible, et qui vise strictement l'adaptation du sujet à son environnement. L'apprentissage comme construction autonome du sujet est oublié.

Limite

Après la publication des travaux de J. PIAGET sur la psychologie cognitive et les processus de maturation du sujet selon son âge, différentes critiques lui ont été faites, notamment pour les effets induits de ses travaux sur les pratiques scolaires. La critique majeure à l’égard de Piaget porte sur le fait que dans ses travaux de recherche il ne tient pas compte du contexte dans lequel le sujet apprend. Les travaux réalisés dans la même période en psychologie sociale et notamment sur le rôle des interactions sociales, révèlent encore davantage les limites des théories de Piaget pour ses applications dans l’enseignement et la formation.

2-5 Modèle socio-constructiviste 

Les apports de Piaget dans le domaine de la psychologie cognitive, l’œuvre de Vygotsky et les études menées sur les interactions sociales (Doise et Mugny, in Johsua S. & Dupin J.-J., 1993) ont fortement contribué à l’élaboration du courant socio-constructiviste. Le socio-constructivisme est une théorie qui met l’accent sur la dimension relationnelle de l’apprentissage. Issu en partie du constructivisme, le socio-constructivisme ajoute la dimension du contact avec les autres afin de construire ses connaissances (Anastassis Kozanitis 2005). Le socio-constructivisme étend les concepts précédents à un groupe social construisant des choses pour un autre groupe, en créant en collaboration une culture d'artéfacts partagés, avec un sens partagé. Il met l'accent sur le rôle des interactions sociales multiples dans la construction des savoirs. Plusieurs concepts fondamentaux se dégagent de ces travaux qui constituent le socio-constructivisme :

le conflit socio-cognitif : Doise et Mugny :            

Dans la poursuite des travaux de Piaget, les chercheurs genevois DOISE et MUGNY, ont mis en évidence que lorsque dans un groupe des individus avaient eu à confronter leurs idées, à entrer en conflit, ils parvenaient à une meilleure progression dans leurs apprentissages individuels. Considérant que les interactions sociales sont un moteur du progrès cognitif, ils ont développé le concept de « conflit socio-cognitif » qui se définit par l’hétérogénéité des réponses qui permet à l’apprenant de progresser. Le conflit socio-cognitif trouve ses applications dans les situations d’apprentissage où le formateur propose des travaux à réaliser en sous-groupes. La progression des apprentissages pour chaque membre du groupe résultera de la façon dont les membres du groupe auront travaillé ensemble, confronté leurs points de vue, leurs idées. C’est à partir de ces confrontations, en dépassant les conflits relationnels, qu’ensemble les sujets qui composent le groupe pourront réussir à construire une réponse sous forme d’un travail de coordination, de réorganisation qui aboutit à une création particulière du groupe.

la zone de proche développement ou zone proximale de développement : Vygotsky (1895-1934)

VYGOTSKY a fortement critiqué les travaux de Piaget qui s’était attaché à démontrer que ce sont les stades de développement qui déterminent les possibilités d’apprentissage.

Dans le cadre de ses travaux sur les relations entre le langage et la pensée, VYGOTSKI, au contraire, s’est attaché à mettre en évidence que ce sont les processus de médiation et de régulation qui permettent l’apprentissage et favorisent le développement.

Pour Vygotsky, le sujet construit sa pensée par un double processus : l’élaboration d’un langage intérieur régulateur de ses conduites, les interactions avec le milieu mais surtout avec l’adulte, l’enseignant qui lui permet la prise de distance avec ses conduites et lui fournit l’aide, « l’étayage » nécessaire pour favoriser l’exploration, le dépassement de ses limites actuelles sans risque. Le langage et la fonction de communication établie par le langage servent de médiation dans les interactions sociales et la construction de la pensée. Les interactions se déroulent dans une zone ou distance dite proximale qui est la distance entre le niveau de développement actuel (ce que je comprends ou ce que je sais déjà faire) et le niveau de développement potentiel que je veux atteindre (ce que je veux arriver à faire). Il considère que cette distance ne doit pas être trop importante ou trop grande (d’où le qualificatif proximale) pour ne pas conduire à l’échec ou au découragement.

l’étayage et le format : Bruner(1991)

Dans la lignée des travaux de VYGOTSKY, J. BRUNER a mis en évidence l’importance de la médiation sociale dans les situations d’enseignement-apprentissage. Dans les interactions entre un adulte et un enfant, l’adulte met en place un processus d’étayage qui permet la mise en place de « formats » qui sont des « mises en formes » qui « guident », « délimitent l’espace et la forme d’échanges réguliers et ritualisés ». C’est à l’intérieur de ces formes et grâce à l’étayage de l’adulte que l’enfant pourra devenir autonome pour résoudre ses problèmes.

Pour J. Bruner « apprendre et penser sont des activités toujours situées dans un cadre culturel et elles dépendent toujours de l’utilisation de ressources culturelles ».

Le socio-constructivisme est un modèle d’enseignement et d’apprentissage pour lequel trois éléments didactiques sont indissociables pour permettre le progrès :

1. la dimension constructiviste qui fait référence au sujet qui apprend : l’étudiant.

2. la dimension socio qui fait référence aux partenaires en présence : les autres étudiants et l’enseignant.

3. la dimension interactive qui fait référence au milieu : les situations et l’objet d’apprentissage organisé à l’intérieur de ces situations. L’objet de l’apprentissage proposé est le contenu d’enseignement.

Les méthodes pédagogiques utilisées dans ce modèle sont : La pédagogie par projet  qui permet à l’apprenant de s’impliquer activement dans un projet signifiant et collectif pour construire ses savoirs à partir de ses interactions avec ses pairs et son environnement (BOULARD G. et al. 2002-2003).

 

 

Rôle de l’enseignant

 

L’enseignant revêt ici les rôles suivants :

Organisateur :il analyse les données à sa disposition qui peuvent être. Les données sur la connaissance de ses élèves,  sur acquis de ses élèves (conceptions, croyances, acquisitions d'ordre cognitif, apprentissages déjà réalisés….), sur apprentissages prévus dans la classe. En fonction de ces données  il choisit l'objectif, donc l'obstacle à franchir par les élèves et organise le dispositif d’enseignement.

Médiateur :l’enseignant est médiateur à deux niveaux : entre le savoir et les élèves (c'est lui qui connaît l'objectif conceptuel visé et qui animera le conflit socio-cognitif en fonction de cet objectif.), entre les élèves eux-mêmes (c'est lui qui anime le conflit socio-cognitif et qui gère les prises de paroles des élèves.)

 Communicateur :Pour exercer la médiation, l'enseignant doit être performant en communication c'est-à-dire qu’il doit favoriser la communication entre les élèves, il doit lui-même bien communiquer avec les élèves et se faire comprendre tout en animant les situations d’apprentissage.

Dans cette perspective, le rôle et la fonction de l’enseignant changent : plus qu’un transmetteur de connaissances, il est un guide, une personne ressource, un tuteur, un régulateur, un passeur, un médiateur.

Rôle de l’élève

L’activité de l’élève est essentielle, il  est au centre de sa réflexion et de son action, il construit une habileté ou son propre savoir, cette construction est étant avant tout le fruit de son activité et l’investissement dans les situations, mais aussi grâce aux relations avec l’environnement social qui lui permet d’auto-socio-construire les connaissances. En pédagogie, on dira que l’étudiant élabore sa compréhension de la réalité par la comparaison de ses perceptions avec celles de ses pairs et celles du professeur.

Evaluation

 

Une évaluation diagnostique doit d’abord être faite pour gauger le niveau de connaissance des élèves lui permettant de pouvoir constituer des groupes équilibrés. De plus L’évaluation ici tient compte des savoirs faire de l’apprenant ; en fait on évalue les compétences individuelles dans un groupe hétérogènes et la capacité d’un ensemble composite (groupe) à appréhender un problème donné.

Avantage

 

BARNIER G. (2001)présente parmi les avantages lies à ce modèle, quelques uns : une meilleure fixation et transferabilite des apprentissages, une meilleure efficacité du fait de la prise en compte des différences individuelles, son action favorable sur la métacognition et le développement de l’autonomie, sa reconnaissance de modèle le plus fidele aux modes de construction individuelle et social de savoirs complexes. Le mérite de ce modèle reste lié à l’importance accordée à la médiation de l’adulte et aux processus de régulation dans le processus de formation.

Limite

 

Les limites ici apparaissent pour répondre aux  questions suivantes : Est-ce que l’apprentissage doit viser et permettre seulement l’adaptation du sujet à son milieu, à    son environnement ? Dans l’apprentissage, quelle est la place faite au projet du sujet dans les situations d’apprentissage proposées par l’adulte le formateur ? L’apprentissage est-il toujours prévisible ? (BOULARD G. et al. 2002 – 2003). D’autre part on lui reconnait néanmoins quelques inconvénients. Citons : Le temps d’apprentissage extrêmement long ; Le temps d’apprentissage extrêmement long ; Certains apprenants dans le cadre du groupe ne travaillent pas. Autrement dit c’est quelques uns seulement qui proposent des idées ; L’enseignant éprouve assez de difficultés dans la gestion des activités de groupe.

 


Schéma 3 Modèle constructivistes et

Ancien équilibre           Déséquilibre     Nouvel équilibre

Socio-constructiviste

                                                                                 

2-6 Résumé 

Il a été question dans ce chapitre de présenter une connaissance des  différents modèles et théories d’apprentissage pouvant permettre au formateur de mieux comprendre les processus d’apprentissage des personnes en formation, elles pourront  lui permettre aussi, de construire un dispositif et des situations d’apprentissage et d’évaluation de ces apprentissages plus adaptées aux personnes en formation mais aussi à leur contexte.

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